Marc Chagall offre, à travers cette sculpture en marbre à dimension narrative rappelant le rouleau de Torah, une interprétation de l’un des récits de la Genèse. Les deux figures entrelacées, l’une féminine, l’autre masculine – à laquelle l’artiste prête ses traits –, évoquent le couple primaire formé par Adam et Ève 1. Des animaux récurrents du bestiaire chagallien, le papillon et l’arbre suggèrent la nature idyllique du jardin d’Éden. La figure d’Ève, mise en valeur par un jeu de volumes, d’ombre et de lumière permis par la taille du marbre, se tient devant Adam dont le corps est à peine visible, posant tendrement sa tête contre la sienne. Ce geste (que l’on retrouve dans la sculpture Les Deux Visages ou Couple (1953) ) reflète l’union et la complémentarité entre le masculin et le féminin, déjà évidentes dans Hommage à Apollinaire ou Adam et Ève (1911 - 1912). Le feuillage cachant le sexe d’Ève traduit sa pudeur et rappelle l’attitude d’une Vénus pudique telle la Vénus d’Urbin du Titien. Peut-être est-ce une solution formelle à la représentation de l’instant où le couple découvre sa nudité après avoir goûté au fruit de l’arbre de la connaissance ? Cette pudeur transparaît dans de nombreuses œuvres de l’artiste, notamment lorsqu’il représente certains nus, offrant la vision d’une féminité idéalisée grâce à un traitement stylisé du corps, pour en retenir l’essentiel, comme dans l’œuvre Le Nuage nu (1945 - 1946).
Deux nus ou Adam et Ève ou Sculpture-colonne témoigne une nouvelle fois de la richesse des sources d’inspiration de l’artiste. Le motif du feuillage fait écho à la statuaire médiévale (par exemple, au bas-relief La Tentation d’Ève provenant de la cathédrale Saint-Lazare d’Autun). Cette référence à l’architecturale médiévale est aussi évoquée par l’un des titres de l’œuvre et le choix du terme « sculpture-colonne2 ». Les figures et leur agencement – légèrement détachées de la forme du bloc – rappellent l’œuvre Les Vendanges taillée dans le bois par Ossip Zadkine, qui partage avec Chagall le goût pour la monumentalité et les compositions verticales, voulant créer « un peuple debout 3 ». La figure féminine aux seins ronds ainsi que cette composition en colonne font également penser à la sculpture ornementale et figurative des temples indiens (bouddhiques et hindous), aux divinités et figures mythologiques voluptueuses, telles les yakshinis ou shâlabhanjikâ (divinité de l’arbre).
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Marc CHAGALL, en collaboration avec Lanfranco LISARELLI, Deux nus ou Adam et Ève ou Sculpture-colonne, 1953, marbre, 53,5 x 23 x 24 cm, Musée national d'art moderne, Paris © Fabrice GOUSSET/ADAGP, Paris, 2024
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Marc CHAGALL, en collaboration avec Lanfranco LISARELLI, Deux nus ou Adam et Ève ou Sculpture-colonne, 1953, marbre, 53,5 x 23 x 24 cm, Musée national d'art moderne, Paris © Fabrice GOUSSET/ADAGP, Paris, 2024
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Marc CHAGALL, en collaboration avec Lanfranco LISARELLI, Deux nus ou Adam et Ève ou Sculpture-colonne, 1953, marbre, 53,5 x 23 x 24 cm, Musée national d'art moderne, Paris © Fabrice GOUSSET/ADAGP, Paris, 2024
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Marc CHAGALL, en collaboration avec Lanfranco LISARELLI, Deux nus ou Adam et Ève ou Sculpture-colonne, 1953, marbre, 53,5 x 23 x 24 cm, Musée national d'art moderne, Paris © Fabrice GOUSSET/ADAGP, Paris, 2024
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Marc CHAGALL, en collaboration avec Lanfranco LISARELLI, Deux nus ou Adam et Ève ou Sculpture-colonne, 1953, marbre, 53,5 x 23 x 24 cm, Musée national d'art moderne, Paris © Fabrice GOUSSET/ADAGP, Paris, 2024
